Fonds en euros « nouvelle génération », unités de compte immobilières, fonds « euro-croissance », transfert vers un PER, sont autant d’alternatives pour palier la diminution du rendement des fonds en euros.
1. Ce qu’il faut retenir
Le rendement moyen des fonds en euros se réduit depuis plusieurs années pour atteindre 1,7 % en 2018 et sans doute moins en 2019. Avec ce niveau de rendement, faut-il continuer à investir sur les fonds en euros ? Selon l’Insee, le taux d’inflation a été de 1,8 % en 2018 et devrait s’établir aux alentours de 1,3 % en 2019. C’est dire que le fonds en euro classique ne préserve plus le pouvoir d’achat de l’épargne placée.
Il faut donc envisager des alternatives ; une réorientation de l’épargne vers des unités de compte de remplacement et/ou vers une nouvelle enveloppe issue de la loi Pacte, le PER.
Remarque
L’assurance vie n’est pas « que » le fonds en euros. Elle demeure un cadre fiscal avantageux (en cas de rachat ou de transmission par décès), mais l’épargne investie doit être diversifiée.
Aujourd’hui, le vrai risque pour l’épargnant est peut-être de ne pas prendre de risques.
Avis :
Pour remplacer les fonds en euros il n’existe pas d’alternative unique, mais plusieurs solutions ou enveloppes peuvent répondre aux objectifs de l’épargnant. Encore faut-il que l’investisseur accepte de prendre un risque. La diversification est maintenant indispensable pour obtenir un rendement. Continuer à verser sur les fonds en euros, c’est la garantie de ne plus gagner d’argent.
2.Conséquences pratiques
2.1.Profil investisseur de l’épargnant
Pour proposer une alternative au fonds en euros, il faut prendre en compte le profil de l’épargnant. Cet exercice est obligatoire pour valider la stratégie d’investissement à adopter.
Plusieurs facteurs sont à considérer ; la situation de famille, le patrimoine global, les objectifs, la tolérance au risque (qui dépend de la personnalité, des expériences passées, des compétences, etc.) mais aussi l’âge et l’horizon de placement.
Selon une vision restrictive (souvent retenue par les juges), un jeune investisseur pourra théoriquement prendre plus de risques, car il a le temps de reconstituer son capital (en cas de pertes), ce qui n’est pas forcément le cas d’un épargnant plus âgé. En vérité, pourquoi ne pas proposer des supports d’investissement diversifiés et rentables à des personnes plus âgées ? Le risque de perte du capital porte plus sur ses ayants-droits que sur l’épargnant lui-même, s’il n’a pas de besoins impérieux de flux supplémentaires.
2.2.Profil de risque et de rendement d’un fonds
Une fois le profil investisseur déterminé (généralement prudent, équilibré ou dynamique), il faut choisir le ou les supports d’investissement à l’aide du profil de risque et de rendement de chaque fonds, contenu dans le DICI (Document d’information clé pour l’investisseur). Ce document d’information est standardisé au niveau européen. Il doit donner, en 2 à 3 pages, une information claire, exacte et non trompeuse permettant à l’épargnant de prendre une décision d’investissement en connaissant les principales caractéristiques du fonds.
Chaque fonds doit être placé sur cette échelle. Concrètement, un fonds à indicateur faible présente des risques faibles, accompagné d’un rendement potentiellement faible. A l’inverse, un indice élevé renvoie à un fonds à risque plus élevé et également à un rendement potentiellement plus élevé.
- Les profils prudents pourront être orientés vers des fonds 1, 2 ou 3.
- Ceux qui sont équilibrés sur des fonds 3, 4, ou 5.
- Et les plus dynamiques sur des fonds 5, 6 ou 7.
Notez que cette limite de « prudence » (≤ 3) est celle retenue par l’arrêté du 7 août 2019 portant application de la réforme de l’épargne retraite, pour la gestion à horizon au sein des PER.
2.3.Unités de compte de remplacement
Selon le profil investisseur de l’épargnant, une partie de son épargne pourrait être réorientée du fonds en euros vers les unités de compte.
Remarque
Il peut être proposé des versements périodiques sur les supports actions ou dynamiques pour réduire la volatilité sur le long terme, plutôt qu’un investissement en une fois. En effet, il est difficile de savoir si les marchés sont actuellement à un point d’entrée. Investir la même somme régulièrement permet de lisser la performance, en augmentant progressivement le risque.
Il peut également être proposé de dynamiser uniquement les gains latents au sein du contrat.
2.3.1.ETF (Exchange traded funds)
Un ETF également appelé « tracker » est un fonds d’investissement cherchant à répliquer l’évolution d’un indice boursier (CAC 40 par exemple) à la hausse comme à la baisse. Les ETF sont émis par des sociétés de gestion. Ils sont gérés de façon passive (par opposition aux OPCVM qui sont gérées de façon active) car leur objectif est de suivre leur indice de référence, sans tenter d’obtenir une meilleure performance. Simples, liquides et peu couteux en termes de frais de gestion, ils n’offrent pas de garantie en capital, mais limitent les frais de gestion.
2.3.2.Fonds flexibles et diversifiés
Les fonds flexibles et diversifiés (sous la forme d’OPCVM) proposent une allocation variable qui évolue en fonction des opportunités sur les marchés financiers. Ils bénéficient du suivi régulier d’une équipe de gestion qui adapte le degré d’exposition aux risques en modifiant l’allocation entre les différentes classes d’actifs si nécessaire. L’horizon d’investissement recommandé est de 3 ans minimum.
2.3.3.Unités de compte immobilières
Les assureurs proposent depuis plusieurs années des unités de compte immobilières telles que des parts de SCPI, SCI ou OPCI. Ces structures gèrent des biens immobiliers locatifs et offrent une rentabilité actuelle attrayante (±4 % par an), à défaut d’une garantie en capital. Investir sur ces supports à travers un contrat d’assurance vie permet de bénéficier d’une fiscalité réduite sur des revenus (par rapport aux revenus fonciers perçus en détention directe) et sur la transmission (assurance vie est un actif hors succession).Ces unités de compte sont imposables à l’IFI.
2.3.4.Les fonds en euros immobiliers
Il s’agit de fonds en euros qui investissent une part significative ou prépondérante de leur actif sur des supports immobiliers : immeubles, SCI, SCPI, OPCI, SIIC, etc. En moyenne leur rendement actuel est significativement supérieur à celui des fonds en euros « traditionnels » : environ +1 %. En outre, ils ne sont pas pris en compte pour l’IFI.La plupart des compagnies restreignent l’accès à ces fonds, assortis d’une garantie en capital.
2.3.5.Fonds structurés
Ce sont des produits complexes dont les conditions de fonctionnement sont clairement définies dans le prospectus détaillé. Les produits structurés visent un rendement supérieur aux fonds en euros. Ils offrent une « garantie » en capital conditionnelle qui n’est donc pas totale. Leur niveau de protection les rend théoriquement moins risqués qu’un placement actions, mais aussi moins performants à la hausse.Ces produits structurés sont peu liquides. L’horizon d’investissement recommandé est de 8/10 ans minimum.
2.3.6.Fonds euro-croissance
Les fonds euro-croissance offrent une garantie en capital qui n’est plus permanente mais uniquement à l’échéance (au minimum 8 ans, durée fixée par l’assureur). L’Euro-croissance permet aux équipes de gestion d’avoir plus de liberté d’action qu’un fonds en euros classique. Une partie du fonds euro-croissance est investie sur des actifs plus risqués pour espérer obtenir un rendement supérieur, et l’autre partie est conservée de façon plus prudente, afin d’assurer la garantie en capital à l’échéance.
Remarque
La Fédération française de l’assurance distingue 2 types de garantie. L’appellation « euro-croissance » concerne uniquement les fonds qui offrent une garantie totale à terme du capital investi. Pour les fonds ne proposant qu’une garantie partielle, c’est la désignation de fonds « croissance » qui doit être utilisée.Pour en savoir plus, voir le Doc. Expert Assurance-vie : Mécanismes « particuliers » §3.Contrat euro-croissance.
2.4.Nouvelle enveloppe issue de la loi Pacte : le PER
Jusqu’au 1er janvier 2023, le transfert des avoirs investis sur un contrat d’assurance vie de plus de 8 ans vers le nouveau placement d’épargne retraite PER (par le biais d’un rachat sur le contrat d’assurance vie) bénéficie d’un double avantage fiscal :
- Exonération des plus-values latentes : le transfert des avoirs investis sur un contrat d’assurance nécessite de procéder à un rachat (partiel ou total). Après 8 ans d’ancienneté l’épargnant bénéficie d’un abattement annuel de 4 600 € (pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés) ou 9 200 € (pour les contribuables soumis à imposition commune). A titre exceptionnel, si les capitaux sont ensuite versés sur un PER (avant le 31 décembre de l’année du rachat), cet abattement est doublé, soit au total un abattement annuel de 9 200 € (pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés) ou 18 400 € (pour les contribuables soumis à imposition commune). Toutefois, cela procure une économie maximale relative de 690 € (9 200 € non taxé à 7,5 %) et suppose d’avoir sur le contrat d’assurance vie plus de 9 200 € d’intérêts latents.
- Déductibilité de l’épargne à l’entrée sur le PER dans la limite du plafond épargne retraite. Le gain fiscal sera alors égal à la somme investie par rapport à taux marginal d’imposition à l’IR. Toutefois, le capital investi sera fiscalisé au barème de l’IR à la sortie. C’est uniquement si le contribuable est imposé à un taux marginal plus faible à la retraite, qu’il y trouvera un réel intérêt supplémentaire.
L’horizon d’investissement pour un PER est le départ à la retraite : le capital investi est bloqué jusqu’à cette date (sauf cas de déblocage anticipé). Les supports d’investissement sont nombreux, aussi variés que sur un contrat d’assurance vie ou de capitalisation.
3.Pour aller plus loin
3.1.Contexte
Le rendement des fonds en euros classiques diminue depuis plusieurs années. Le taux moyen servi (net de frais et brut de prélèvements sociaux) par ces fonds en 2018 était de 1,7 %. Le rendement 2019 devrait subir une baisse significative qui a été annoncée par plusieurs compagnies d’assurance.
Cela s’explique par la composition des fonds en euros qui contiennent en moyenne 80 % d’obligations. Ces obligations sont pour 58 % des emprunts d’entreprises privées et pour 42 % des dettes souveraines.Or le rendement de cette classe d’actifs ne cesse de décroître. Les taux longs ont diminué et sont même négatifs, pour la première fois, depuis cet été. Ainsi les emprunts d’état ne sont plus rémunérateurs.
Rappel
Taux des emprunts d’Etat (TME) ayant une échéance de plus de 7 ans
- Septembre 2019 = – 0,21
- Septembre 2018 = + 0,79
Comment garantir un capital alors même que le support d’investissement ne permet pas d’avoir un rendement positif (avant frais de gestion du contrat) ? Les compagnies d’assurance prennent des mesures pour pouvoir tenir leurs engagements de garantie en capital.
3.2.Mesures prises par les compagnies d’assurance
3.2.1.Freiner la collecte sur les fonds en euros en limitant les entrées
Depuis plusieurs années, la plupart des compagnies d’assurance n’acceptent plus d’allocation à 100 % sur les fonds en euros pour les souscriptions de contrats d’assurance vie ou de capitalisation. Elles exigent une quote-part d’unités de compte dès le 1er euro ou au-delà d’un certain montant.
D’autres assureurs refusent de diminuer les frais d’entrée lorsque le versement est effectué sur le fonds en euros en espérant décourager les épargnants. Toutefois cela se relève peu efficace, la collecte de janvier à aout 2019, a été réalisée à 24 % sur des unités de compte et à 76 % sur les fonds en euros (source : Fédération française de l’assurance).
De plus l’encours des fonds en euros est colossal. A la fin de l’année 2018, il était de 1 372 milliards d’euros soit 80 % des sommes investies en épargne-vie ou capitalisation (source : Fédération française de l’assurance).
3.2.2.Proposer des fonds en euros nouvelle génération
Les compagnies ont développé de nouveaux fonds en euros investis en partie sur des supports plus rémunérateurs comme les actions ou l’immobilier.
- fonds euro-dynamiques: l’assureur partage le capital entre 2 poches, une peu risquée et une plus dynamique. La quote-part investie sur la poche dynamique varie en fonction des convictions de l’assureur (s’il pense que les marchés vont baisser, il la diminue et vice-versa). Ces fonds sont garantis en capital et bénéficient de l’effet cliquet annuel (ce qui est gagné est acquis définitivement). Toutefois, le rendement n’est pas linéaire, l’horizon d’investissement est donc à moyen/long terme.
- fonds euro-immobilier : l’assureur investi (en direct ou en parts de SCPI) en immobilier de commerces, bureaux ou entrepôts, loués à des entreprises. Le rendement est relativement stable. Toutefois, victime de leur succès, les assureurs limitent la collecte sur ces supports également.
Ces supports sont une alternative pour les épargnants qui veulent percevoir une rémunération plus élevée que pour un fonds en euros « classique » sans toutefois renoncer à la garantie en capital.
Selon l’évolution des marchés financiers ou immobiliers, leur rendement pourrait techniquement fondre rapidement.
3.2.3.Utiliser les réserves
Les assureurs ont constitué des provisions pour participation aux bénéfices, réserve de capitalisation, plus-values latentes sur l’immobilier et plus-values latentes sur les actions. Elles peuvent être utilisées pour palier à la diminution du rendement des fonds en euros.Toutefois cette solution sera temporaire car les réserves sont limitées. De plus, le HCSF peut moduler, par hypothèse à la baisse, la performance des fonds euros afin de limiter la reprise de la provision et donc empêcher l’organisme de prélever dans la provision pour booster la performance annuelle du fonds. Pour en savoir plus, voir notre Doc. Expert Loi Sapin II (Loi 09/12/2016), §1.3.Limitations de la performance des fonds euros par le HCSF.
3.2.4.Fermer les fonds en euros en attendant une remontée des taux
Les compagnies d’assurance envisagent de fermer, au moins temporairement, leurs fonds en euros à la souscription (ou à l’arbitrage entrant) pour préserver leur rendement à long terme. La Banque centrale européenne repousse régulièrement la date à laquelle elle pourrait relever les taux d’intérêt. La dernière annonce fixe la date à mi-2020.
Source : Fidroit, fidroit.fr